« C'est bon de vous voir », un exemple de témoignage de compassion qui pourrait être celui d’un oncologue à son patient, un exemple donné par ces chercheurs de l'Université de Rochester qui étudient ici le rôle de la compassion dans l’exercice médical. La compassion est-elle seulement souhaitable de la part du médecin ou du professionnel de santé ? Oui, répondent ces auteurs qui publient leurs conclusions dans la revue Health Expectations et commencent à construire ici une sorte de taxonomie des comportements de compassion dans la relation médecin-patient.
Ces chercheurs de Rochester sont probablement les premiers à avoir cherché à identifier de manière systématique les actes et les paroles de compassion dans la relation médecin-patient et, à partir de leurs observations, menées auprès d'oncologues et de leurs patients atteints de cancer de stade III ou IV, à avoir construit ce premier catalogue de ce type « d'intervention ». L'objectif, créer une taxonomie des comportements qui pourra servir de base à la formation médicale. Car, convaincu par l'utilité de la compassion, le Dr Epstein, auteur principal de l'étude, avait observé que de nombreux médecins vont préférer aborder les questions techniques et médicales avec leurs patients plutôt que de tisser des liens affectifs.
Il faut préciser que Ronald Epstein, professeur de médecine familiale, de psychiatrie, d'oncologie, et de soins infirmiers est un expert international de ce type d'intervention, et un chercheur reconnu sur la pleine conscience et la communication dans l'enseignement médical.
Son équipe a recruté 23 oncologues puis a analysé le déroulement des consultations enregistrées avec 49 de leurs patients pour tenter d'identifier des marqueurs clés de compassion. L'objectif de cette étude était précisément d'identifier des exemples des trois principales manifestations possibles de compassion du médecin vis-à-vis de son patient, la reconnaissance de la souffrance, la résonance émotionnelle et les initiatives de prise en charge de la « souffrance ». Ce sont, contrairement à l'empathie, des manifestations qui nécessitent une imagination plus active de l'état du patient.
L'humour participe à ces manifestations et apparaît un « outil » très utile pour remonter le moral d'un patient sans nier la gravité de la situation. Mais le ton de la voix, son timbre, sa hauteur, son volume, les gestes qui peuvent évoquer « la tendresse » et la compréhension, et d'autres méthodes ont été identifiées qui permettent d'apporter de l'assurance ou un confort psychologique au patient. En particulier, la communication non verbale, comme des pauses ou des soupirs aux moments opportuns et certaines attitudes, ont également été décryptées.
La compassion se développe au fil de la relation au patient et tout au long cours du processus, les médecins doivent se « battre » pour ne pas dévier de la difficulté d'un pronostic qui doit permettre au patient d'entrevoir puis admettre l'incertitude, et faire son deuil d'une vie « normale ». La compassion est donc, en matière médicale, un ensemble complexe de signes de présence et d'engagement qui imprègne toute une conversation, concluent les auteurs.
Source: Health Expectations DOI: 10.1111/hex.12160 In search of compassion: a new taxonomy of compassionate physician behaviours
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