A l’heure de la réorganisation de la visite médicale des laboratoires pharmaceutiques en France, cette étude de l’Université de Colombie-Britannique (Canada) montre des médecins généralement mal informés sur les effets secondaires des médicaments au cours de ces visites. Selon l’étude, publiée dans l’édition du 10 avril du Journal of General Internal Medicine, la majorité des médecins généralistes recevraient peu ou pas d’informations sur les effets secondaires, via la visite médicale, et restent dans l’ensemble, toujours sensibles, dans leur intention de prescription, à l’effet de la visite. A noter, l’étude a été menée en 2009 et 2010.
Cette étude, présentée aujourd’hui comme la plus complète sur la visite médicale pharmaceutique, a été menée à partir de questionnaires remplis par des médecins après chaque visite médicale concernant un médicament. Les chercheurs de l’UBC, l’Université d’York, de Montréal, de Californie et de Toulouse ont recruté les médecins participants à partir des fichiers de médecins généralistes de 4 sites, Vancouver, Montréal, Sacramento et Toulouse.
Parmi les médecins contactés, 255 ont accepté de participer et des informations ont été recueillies par questionnaires remplis par ces 255 médecins à la suite d’un total de 1.692 visites médicales, de mai 2009 à Juin 2010. L’objectif était d’évaluer les informations apportées par le visiteur médical sur l’innocuité des médicaments.
L’analyse montre que dans la majorité des cas –sauf en France-, les visiteurs médicaux n’ont fourni aucune information sur les effets secondaires les plus fréquents ou les plus sévères ou sur le type de patients qui ne devrait pas utiliser le médicament.
· La bonne délivrance des données de sécurité reste limitée à 1,7% des visites,
· La délivrance de « quelques informations » sur les effets secondaires vs aucune information, est plus fréquente à Toulouse (61%- Voir histogramme du haut) qu’à Montréal et à Vancouver (34%) ou Sacramento (39%),
· les événements indésirables graves sont rarement mentionnés, seulement lors de 5 à 6% des visites médicales sur les 4 sites,
· pourtant 45% des visites prises en compte dans l’étude concernaient des médicaments éthiques à risques secondaires pouvant être graves.
· Les médecins considèrent néanmoins la qualité de l’information scientifique soit bonne ou soit excellente dans 54% des visites et se déclarent « prêts à prescrire » dans 64% des cas (Voir schéma ci-contre, pour Toulouse).
Barbara Mintzes, auteur principal de l’étude, explique que quel que soit le pays d’étude, en pratique aucun contrôle n’est (nétait) exercé sur les visites et peu de sanctions sont réellement appliquées en cas de « promotion » trompeuse ou inexacte. Ainsi, les risques secondaires graves ne sont mentionnés que dans 6% des cas, selon cette étude. La France se détache néanmoins « du lot », et le terrain effectué à Toulouse montre que les médecins de Toulouse sont plus susceptibles d’être informés des effets secondaires par la visite médicale, par rapport aux médecins canadiens ou américains. Les chercheurs attribuent ces résultats aux normes de réglementation plus strictes pour la promotion des médicaments en France.
Source: Journal of General Internal Medicine April 2013 Pharmaceutical Sales Representatives and Patient Safety: A Comparative Prospective Study of Information Quality in Canada, France and the United States (Visuels UCB : 1er schéma : quantité d’information donnée à un médecin sur les bénéfices et les effets
indésirables au cours d’une visite d’un visiteur médical- 2d schéma : Disposition des médecins interrogés (ici à Toulouse) peu après une visite médicale, à prescrire le médicament)