Le stress au travail et les problèmes de santé mentale contribuent aussi et tout particulièrement à la hausse des taux de suicide chez les médecins, révèle cette étude de l’Université du Michigan. Malgré un accès censé être privilégié aux soins et aux traitements, les médecins sont moins enclins à solliciter un traitement en santé mentale et leurs problèmes au travail sont associés à un risque plus élevé de suicide que dans d’autres professions. Conclusions dans la revue General Hospital Psychiatry.
Le fait saillant de cette étude est que les médecins, atteints de troubles mentaux, sont sous-traités en dépit de leur accès aux soins : Bien que plus de médecins que de non-médecins participant à l’étude avaient connu des problèmes de santé mentale avant le suicide, le taux d’utilisation des antidépresseurs était plus faible chez les médecins. Ainsi, rappellent les auteurs, la dépression majeure est un facteur de risque connu pour le suicide, en particulier chez les femmes médecins.
Les auteurs ont utilisé les données de l’United States National Reporting System pour évaluer les données démographiques, les variables de santé mentale, les facteurs de stress récents et les méthodes de suicide chez les médecins victimes de suicide par rapport aux non-médecins dans 17 pays. Au total, l’analyse a porté ainsi sur 31.636 victimes de suicide dont 203 identifiées comme médecins et révèle que les principaux facteurs de suicide, chez les médecins sont soit un trouble de santé mentale soit un problème professionnel. L’identité d’un médecin est fortement liée à sa fonction professionnelle et le stress au travail être un facteur encore plus puissant de risque de suicide.
Overdose de médicament : L’étude révèle que les médecins qui se sont suicidés étaient plus susceptibles d’avoir des médicaments qui pouvaient être mortels dans leur champ d’activité et prescription. Ainsi, les médecins étaient significativement plus susceptibles que les non-médecins d’avoir pris des antipsychotiques, des benzodiazépines et des barbituriques (identifiés par les tests de toxicologie), mais pas d’antidépresseurs. Ainsi, parmi les médecins, si le premier moyen reste l’arme à feu comme en population générale, la méthode n°2 est par overdose de médicament…
Par crainte de la stigmatisation ? «Si cette population a sans doute un excellent accès aux soins, elle ne se donne pas accès au traitement adapté, principalement par crainte de la stigmatisation », ajoute l’auteur qui fait état d’une croyance selon laquelle les médecins devraient être en mesure d’éviter la dépression ou tout simplement de s’en remettre par eux-mêmes. L’absence de confidentialité par rapport à un patient lambda, la possibilité de se traiter soi-même peuvent expliquer pourquoi les médecins ne vont pas non plus vers un traitement formel de leurs problèmes de santé mentale, explique le Dr Katherine J. Gold, professeur adjoint d’obstétrique et de gynécologie à l’Université du Michigan, auteur principal de l’étude.
Chez les internes aussi : Une précédente étude de l’Université du Michigan avait porté sur les facteurs de risque de stress et d’épuisement professionnel chez les étudiants en médecine. Un taux élevé d’anxiété, de dépression et d’épuisement professionnel avait été constaté chez les étudiants en médecine comme chez les médecins.
Les auteurs concluent donc à la nécessité de réfléchir aux moyens de lutter contre la stigmatisation, le sous-diagnostic et l’insuffisance de traitement de la dépression chez les médecins et les internes. « Nous avons besoin de rendre plus facilement accessibles et plus confidentiels, pour les médecins, les soins et traitements en santé mentale ».
Source: General Hospital Psychiatry (2012) online 05 November 2012 Details on suicide among U.S. physicians: data from the National Violent Death Reporting System (Visuel NIH)