L’Académie de Médecine propose ce point d’actualité sur la responsabilité médicale, dont un bilan sur la Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (Loi Kouchner) et, plus particulièrement sur les nouvelles conditions de traitement juridique des accidents médicaux. L’objectif de renforcer le dialogue et la conciliation, avec la création d’instances spécifiques pour régler les litiges à l’amiable et d’un mécanisme de solidarité nationale permettant l’indemnisation, semble avoir été atteint alors que 10 années plus tard la saisine des juridictions diminue. Néanmoins, la vigilance reste nécessaire, face notamment à la croissance du montant des indemnités et autres questions d’actualité.
Les nouveaux processsus d’indemnisation : Françoise Avram, Magistrate, en situation de détachement auprès de l’ONIAM, Présidente de la Commission de Conciliation et d’Indemnisation (CCI) d’Ile de France propose un point sur les rôles des CCI, de l’ONIAM (Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux) et de la CNAMED (Commission Nationale des Accidents Médicaux), depuis la loi du 4 mars 2002.
· Chaque CCI est composée de membres d’origines diverses et sont présidées par un magistrat de l’ordre judiciaire ou administratif. Ce sont des commissions de règlement amiable, administratives, de nature non juridictionnelle. Leur saisine ne supprime en rien la possibilité de recours devant les juridictions. Elles constituent des « guichets uniques » susceptibles de traiter aussi bien les dossiers mettant en cause les établissements de santé publics que ceux mettant en cause les professionnels de santé exerçant à titre libéral ou les établissements de santé privés. Les CCI ne sont compétentes que pour les dommages dont le fait générateur s’est produit postérieurement au 4 septembre 2001 et qui présentent un certain degré de gravité. Lorsque le dommage n’atteint pas ces seuils de gravité, la commission propose une conciliation. Elles émettent des avis « sur les circonstances, les causes, la nature et l’étendue des dommages, ainsi que sur le régime d’indemnisation applicable » (art. L 1142-8). Pour ce faire, l’élément essentiel dont elles disposent est une expertise médicale.
· Qui doit indemniser (assureur ou ONIAM) et quels préjudices doivent l’être, sont indiqués par avis des CCI, s’il y a lieu à indemnisation. L’indemnisation peut être fondée sur la responsabilité (indemnisation par assureur) en cas de faute ou d’infection nosocomiale, ou faire intervenir la solidarité nationale (indemnisation par l’ONIAM) en cas d’aléa thérapeutique ou d’infection nosocomiale grave. L’assureur ou l’ONIAM doit alors adresser au demandeur une proposition d’indemnisation dans les 4 mois. Une acceptation par ce dernier vaut transaction au sens du code civil (a. 2044) et met fin au « litige ». L’ONIAM peut se substituer à l’assureur qui ne fait pas de proposition d’indemnisation dans le délai de 4 mois. L’ONIAM n’est cependant pas lié par les avis des CCI et le seul recours contre un avis ou un refus de l’ONIAM est la saisine d’une juridiction de droit commun.
Responsabilité médicale, entre responsabilité et solidarité : Frédérique Dreifuss Netter, Conseiller à la première chambre civile de la Cour de cassation, propose un point sur la jurisprudence en matière de responsabilité médicale, la loi du 4 mars 2002 ayant également donné lieu à une série de décisions judiciaires pour la mise en place de son application. C’est ainsi que l’on a assisté au recul, pour les professionnels de santé, de la responsabilité sans faute, au profit, le plus souvent, de la solidarité nationale, dont le domaine a dû être précisé, tant pour ce qui est des accidents médicaux non fautifs que des infections nosocomiales.
La distinction entre responsabilité et solidarité, voulue par le législateur, s’est cependant vue affectée par l’affirmation des droits des personnes malades, dont la méconnaissance par le médecin peut être source de responsabilité, en particulier quand il s’agit de l’information sur les risques de l’intervention ou du traitement projeté.
Plus généralement, la jurisprudence a dû élaborer des solutions nuancées pour répondre aux exigences suscitées par le caractère multifactoriel des dommages en matière médicale, et même, parfois, à l’incertitude scientifique entourant leurs causes exactes.
Le Pôle de Santé Publique au sein du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris : Pascal Gand, Juge d’instruction au Tribunal de Grande Instance de Paris, coordonnateur du pôle de Santé Publique créé en 2003 au sein du Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris pour traiter des dossiers de sécurité sanitaire au niveau pénal, précise sa compétence territoriale double :
· à la fois les dossiers parisiens de responsabilité médicale (résultant notamment des nombreux sièges sociaux et établissements hospitaliers installés à Paris)
· et les dossiers initiés en province et venant au pôle sur dessaisissement, en raison selon les termes de l’article 706-2 du Code de Procédure pénale (CPP) de leur « grande complexité ».
Des procédures très « particulières », qui se caractérisent par,
· la technicité non seulement de la matière mais aussi de la réglementation applicable,
· le nombre très important de parties concernées dans le cas des accidents dits « sériels »,
· une forte médiatisation,
· de nombreux dossiers portant sur des faits anciens qui n’ont été découverts et dénoncés que plusieurs années après leur commission, lorsque le dommage a été révélé.
Des défis et les enjeux multiples pour le juge d’instruction :
· Eviter de se laisser dominer par la complexité de la matière en revenant toujours aux éléments constitutifs de l’infraction pénale,
· essayer de concilier une durée raisonnable d’investigations avec un traitement individualisé de chaque plainte et ce, malgré la taille du dossier, le volume d’informations à traiter et le nombre très important des parties dans les délits « sériels ».
Communiqué Académie de Médecine
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Responsabilité de l’infirmière
La responsabilité civile professionnelle de l’infirmière libérale